Saint Augustin considère que l’Alléluia est le « chant nouveau de l’homme nouveau », un chant de louange adressé à Dieu et qui exprime la joie de ceux que Dieu a sauvés de la mort, même s’ils ne le sont encore qu’en espérance. Il en explique le sens à partir de sa racine hébraïque, selon ses deux composantes : « allelu – halelou (louez)/ ia – diminutif de Yaveh (Dieu) » : « Ainsi donc en chantant « Alléluia », c’est-à-dire « Louez Dieu », nous nous excitons mutuellement à bénir Dieu, nous célébrons ses louanges, et nos coeurs nous font entendre en son honneur, par le chant de l’Alléluia, des sons plus harmonieux que les sons d’une lyre », commente-il.
Saint Augustin indique également que, de son temps, en Afrique du Nord, l’Alléluia était dans la
liturgie exclusivement réservé aux cinquante jours qui séparent Pâques de la Pentecôte. C’est le chant du temps pascal, célébrant la joie de la résurrection promise par le Christ. Durant ces cinquante jours entre Pâques et la Pentecôte, l’Alléluia se chantait « tous les jours ».
Il explique que le chant de l’Alléluia met en lumière le contraste entre le temps de Carême, image des misères de la vie ici-bas et le temps de Pâques, avant-goût de la joie éternelle. Il écrit : « Le temps qui précède Pâques est le symbole des tribulations actuelles ; le temps où nous sommes, et qui suit Pâques, est le symbole de cette félicité dont nous jouirons plus tard. Nous célébrons dès lors avant Pâques notre vie actuelle, et après Pâques, nos fêtes sont le symbole de ce bonheur qui n’est pas encore le nôtre. Aussi
l’un de ces temps est-il passé dans le jeûne et la prière, et dans l’autre, nous nous relâchons de nos jeûnes, pour chanter les louanges de Dieu ; c’est ce que nous marque le cantique Alléluia ».
Il faut ajouter, par ailleurs, que sur la nature de ce chant de l’Alléluia, saint Augustin note que son exécution ne relève pas seulement et simplement de la compétence musicale. « Ils peuvent bien tous se signer du signe du Christ ; tous répondre : Amen ; tous chanter : Alléluia ; être tous baptisés, entrer dans
les églises, bâtir les murs des basiliques, les fils de Dieu ne se discernent des fils du diable que par la charité… », prévient-il. Le chant de l’alléluia n’est donc pas d’abord une question de voix, mais de vie.
Abbé Roger Gomis, du Sénégal